Maison d'Antonine Maillet, photos©Marie-France Gadbois |
Antonine Maillet habite aujourd'hui à Montréal. Mais, près de Bouctouche au Nouveau-Brunswick,
sa ville natale, un phare s'élève devant la mer. Un refuge pour l'écrivaine d'influence
rabelaise qui a su porter les mots des Acadiens bien au-delà des "partys
de cuisine" (rencontres familiales) où l'Acadie se racontait.
Cet espace de création dominant la mer nourrit l'inspiration
de l'écrivaine disciplinée, qui, chaque matinée, grimpe dans son phare, en saison,
pour donner la parole à ses personnages. Pélagie-la-Charrette (Prix Goncourt
1979), la Sagouine, Mariaagélas…
L'Acadie se raconte, sous la plume d'Antonine Maillet.
Extrait de la Sagouine:
"J’ai peut-être bien la face nouère pis la peau craquée, ben j’ai
les mains blanches, Monsieur! J’ai les mains blanches parce que j’ai eu les
mains dans l’eau toute ma vie. J’ai passé ma vie à forbir. Je suis pas moins
guénilleuse pour ça… J’ai forbi sur les autres."
* * *
Pour continuer notre jeu d'écriture, nous vous proposons aujourd'hui d'écrire un petit texte où la neige tient un rôle central : bataille de boules de neige, bonhomme de neige, étendues enneigées, horizon blanc, flocons, blizzard et poudrerie, laissez cours à votre inspiration!
Marie-France Gadbois
" Ca ne t'ennuie pas si on se pose sur toi ?"
RépondreSupprimerAvec ses yeux fixes un volatile a toujours l'air de guetter un ennemi prêt à surgir.Si alarme aussitôt envol.Présentement rien d'anormal ne semblait se tramer. Il était perché sur une branche et quoiqu'aux aguets il se reposait.
Donc, là, sur une haute cime parmi tant d'autres pointes droites vers les hauteurs célestes, l'oiseau fut très surpris.Il lui semblait qu'on lui avait" parlé" comme disent les humains. La voix était douce, même tendre.Enfin c'est ainsi qu'il l'analysait mais il ne saisissait pas d'où ce miracle provenait.Il était seul, absolument seul en son perchoir. Il avait bien compris " ça ne t'ennuie pas si on se pose sur toi?" Soudain il n'eut plus de doute, cette question émanait de lui, de son corps, de ses plumes.Certes il voyait partout un immense frondaison blanche tomber du ciel et peindre le sombre en blanc. Oui ça il le voyait. Ce n'était pas nouveau. Tous les hivers un gigantesque burnous blanc endormait les paysages, mais dans le silence!
Cet oiseau n'était pas fou, on lui avait bien parlé, bien posé une question..;" pose sur toi". Il n'y avait que la neige qui se posait sur lui. A tout hasard il répondit " Faites ce vous voulez je n'y vois pas d'inconvénient"
" ah merci"
Ce " ah merci" lui semblait accompagné d'une pression d'affection sur ses ailes.sur ses plumes. Oui il n'y avait pas de doute, la neige lui parlait , en tous cas les milliers de cristaux qui doucement s'accumulaient sur son corps, eux lui parlaient. Il hasarda une question " pourquoi sur moi et pas ailleurs ?"
" on vient de loin, on ne veut pas fondre tout de suite.Sur toi on restera entre nous.On a la chance d'être nés au même moment.On ne veut pas se séparer. Quand on sera fondus on sera morts.On mettra peut-être des milliers d'années à se retrouver, se regrouper. L'évaporation c'est pour les nuages, eux ils se baladent. Est-ce que l'on se retrouvera tous , nous qui sommes sur toi, au même endroit pour redevenir cristaux ? . On devrait toujours rester cristaux, c'est si beau. On a l'impression d'être une petite main ouverte de la paume de laquelle s'ordonne d'une manière stricte des bras de dentelle.
" bien sûr rétorqua l'oiseau. La fonte c'est un camp d'extermination. Je vous aime bien. Tout blanc. J'ai l'impression d'être dans un costume du dimanche."
" chouette, crièrent alors les millions de cristaux, tu vas nous protéger du vent.On reste sur toi. On t'aime."
" HELAS" soupira l'oiseau et il s'envola.
Merci pour ce beau texte, ce dialogue entre la neige et l'oiseau.
SupprimerCette symbiose entre froid êt chaud, cette bienveillance de l'oiseau pour la neige.
Merci pour ce texte
RépondreSupprimerMerci pour les très belles photos de Bouctouche sous soleil et avec la neige. La lumière est magique.
A bientot
Odile
Les flocons virevoltent à ma fenêtre et s'aplatissent mollement sur le carreau. Bientôt, ils seront si nombreux que je ne verrai plus le paysage blanc et gris. Les éléments se déchaînent sur les maigres arbrisseaux qui bordent la mer noire et tumultueuse.
RépondreSupprimerLe feu crépite dans la cheminée et je laisse mon imagination vagabonder...
Merci madeleine
SupprimerJ'apprécie moi aussi quand il neige d'être a l'abri. Une pensée va alors un instant à ceux qui sont dehors au travail ou dans la rue. Le rythme de ton texte est vif
L’oiseau s’en est allé parmi les flocons neigeux tombant sur Bouctouche, surpris par le mouvement du rideau derrière la fenêtre de la maison du phare. Les cristaux de neige lui laissent un passage et une joyeuse farandole se met à virevolter. Tourbillons, boucles, piqués, formations en V et autres mouvements irréguliers animent ainsi le ciel, entre le bleu profond de la mer et le velours neigeux ridé par le vent qui recouvre le sol. Ces quelques minutes de spectacle vivant captivent la dame à sa fenêtre. Et la musique des brindilles de bois qui, par ci par là, crépitaient dans sa cheminée en font une symphonie de feu et de glace.
RépondreSupprimer« - Où vas-tu petit oiseau, ne crains-tu pas le vent et le froid ? Si tu t’abrites sur ma terrasse, je te donnerai une boule de graines et de gras ! Nous pourrions être amis !
- Je voudrais bien lui répond l’oiseau. Hélas, je ne peux rester inactif car si la neige est douce et me chatouille les yeux, elle est trop lourde à porter sur mes ailes, j’en mourrais de froid. Tu es bien à ton aise de me dire cela, à l’abri dans ta grande maison. Viendrais-tu toi dehors me tenir compagnie, te laisser couvrir de neige et bousculée par le vent ? »
J'aime cette synthèse ici entre la dame, l'oiseau êt la neige. L'accord entre l'humain l'animal êt l'eau gelée. Cette sensation est très frequente au Canada ou la nature est très présente êt proche, surtout la forêt, les écureuils, les oiseaux un peu moins. On y vit avec marmottes, écureuils, ils sont chez nous ou plutôt on se sent parfois de trop chez eux.
SupprimerMerci pour ce beau texte
Elle était juste là. Au-dessus de ma tête à me regarder dédaigneusement de ces deux yeux bridés et un air ébouriffé. Un peu plus et je ne la voyais pas. Je m’étais arrêtée, un peu handicapée par cette obligation de me moucher. J’aurai préféré ne pas perdre le bon rythme enfin trouvé depuis que j’avais rejoint le Hudson Trail. Les conditions de ce beau samedi de mars étaient parfaites pour le ski de fond. Et malgré un départ compliqué, cela faisait déjà une bonne heure que l’air frais, la belle neige et la forêt m’avaient remise de bonne humeur. Et puis voilà que rangeant mon mouchoir dans ma poche, je lève machinalement la tête et croise son regard. Une magnifique chouette rayée, une de ces rencontres inattendues et pourtant prévisibles, qui nous met le cœur en joie. Je suis restée là, mes bâtons plantés sur la piste, mes skis en canard, à la regarder. L’éberluée, c’était moi. Elle a plissé les yeux, plusieurs fois. Et elle a repris son sommeil. Manifestement, je ne représentai ni danger ni intérêt…
RépondreSupprimerLa chouette, l'oiseau de la sagesse qui ne bouge pas qu'on ne dérange pas, qui domine. Quelle belle apparition ! Une surprise semble t'il alors qu'elle est chez elle êt que le promeneur est finalement un intrus mais il se sent bien, accueilli parce qu'il glisse sur les skis, qu'il ne fait pas de bruit êt peut être qu'il ne développe enfoui dans des vêtements épais aucune odeur humaine.
SupprimerMerci pour ce beau texte
Neige qui tombe, tombe, tombe, tombe, tombe ...... qui m'ensevelit, qui tente de m'endormir, de m'asphyxier, de me tuer! Flocons d'enfer, comme une armée venue du ciel ..... j'en ai marre, fou le camp, débarrasse!!! Membrane du désespoir que ta vie fonde, ruisselle, aux rayons de mon dieu soleil!
RépondreSupprimerMerci pour ce court texte eh oui la neige qui n'en finit pas que rien ne stoppe qui tombe sans fin êt gene nos mouvements nos sorties
SupprimerL'exaspération existe êt contre elle, la neige, on ne peut rien.
Belle ouverture avec ce petit texte merci
La neige tombait fine et dense depuis deux jours et deux nuits déjà. Tout était blanc autour de moi, la ligne de séparation entre ciel et terre était effacée et seul le profil noir des quelques arbres de mon jardin rendait réel le monde environnant en lui conférant du relief. Au cours du premier jour, j’avais régulièrement pelleté et dégagé l’allée reliant la maison à la route afin de pouvoir m’en aller au gré de mon envie. Mais dès le deuxième matin, j’avais abandonné cette inutile corvée, me rendant compte que le rapport de force entre mes muscles courbaturés et les intempéries était très nettement à mon désavantage.
RépondreSupprimerDésormais, un bon mètre de neige bloquait la porte du garage. D’autre part, l’idée de sortir à pied me paraissait tout aussi illusoire, au vu du blizzard qui soufflait avec acharnement et des 5 kilomètres qui séparaient ma maison du premier hameau. D’ailleurs, ce sentiment d’impuissance devait être certainement partagé par les services de la voirie puisqu’aucun chasse neige n’était passé depuis bien longtemps. Et le reste du monde, m’avait-il oubliée aussi?
Me voilà donc prisonnière chez moi. Finalement, la frustration dérivant de mon impuissance céda la place à la résignation lorsque je m’aperçus que j’étais réellement coupée du monde extérieur : aussi bien la ligne électrique que téléphonique avaient déclaré forfait face à l’opiniâtreté des flocons qui continuaient de virevolter allègrement avant de se déposer sur le sol, indifférents à mon état d’âme.
Tel Robinson Crusoé sur soin île, je fis l’inventaire de mes réserves de nourriture, de bougies et de buches pour la cheminé. J’en conclus avec satisfaction que je pouvais facilement survivre à cette tourmente pendant plusieurs jours.
Et voilà que, bizarrement, je réalisai que la situation exceptionnelle et imprévue dans laquelle je me trouvais m’avait mise de bonne humeur comme je ne l’avais pas été depuis longtemps.
Federica
Belle entrée dans un monde de neige. La neige comme une gardienne qui tient prisonnière êt cette idée de liberté qui s'autodétruit grace a la prévoyance, à la philosophie de l'humain. Coupée du monde mais a l'abri êt heureuse de cette pause, de cette mise a l'écart.
SupprimerBelle description autour de ce paradoxe
Merci
Ouh c'est froid ! Glacé et mouillé. Cela pique les doigts et fond dans la main. Mais en pressant fortement je pourrais former un boule et la lancer ! si je m'assieds dessus cela fait une bruit de glissement comme si la compression occasionnait une douleur. C'est confortable sous ma doudoune. Cela épouse la forme de mes fesses. C'est froid, très froid et l'humidité perce !
RépondreSupprimerMaman est forcée de chasser la neige mais quand elle tombe je l'entends s'arrêter dans son travail et murmurer comme c'est beau.
Blanc tout blanc... difficile à comprendre... la neige elle feutre les bruits, cajole le paysage d'une couverture froide et souple. J'aime ce bruit quand je marche ce crissement. Les odeurs sont gelées depuis longtemps et la neige a cette fraicheur, cette malice aussi de couler dans le col de mon manteau quand je reste trop longtemps dehors et que maman m'appelle de l'autre côté de la maison.
Elle est belle, si belle ... je l'ai gouté, elle a un gout râpeux un peu spécial. Ce n'est pas comme un ice-cream, plutôt comme un granité, celui au citron que l'on fabrique l'été.
La neige ... si un jour je voyais, l'ophtalmo jure qu'on fait tellement de progrès, c'est la neige que je voudrais voir en premier, au soleil, avec ses ombres violettes et derrière des lunettes de soleil por ne pas m'abimer les yeux...
Un essai de décrire la neige sans la voir. Un peu maladroit peut être ...
SupprimerMaladroit ? Je ne partage pas l'avis précédent. Je trouve au contraire ce texte plein de charme, écrit avec une sensibilité pudique, élégante et la fin fonctionne très bien. On n'a presque pas envie de continuer ton histoire, bref, j'ai aimé !
SupprimerMerci pour ce retour
SupprimerLa neige c'est si difficile a peindre ou à decrire
Dans ce sens maladroit face à cette beauté, cette force aussi quand la tempête fait rage et boucle les issues
La photo de droite le montre bien
Odile
Neige neige me rappelle le tres beau roman de Maxence Fermine illustrée d'aquarelles
RépondreSupprimerTitre Neige
Une petite perle !
Haïku êt neige, haïkus êt froide blancheur, au Japon une si belle histoire d'amour qui finit mal ....
Padillah rêve de neige. On lui a dit que c'était blanc et froid, que les flocons formaient des étoiles de glace. Il avait vu les skieurs descendent les pistes, les images de noel avec la neige sur les toits. Il connaissait le bonhomme a large barbe blanche. Il avait même touche à Brunei de la neige artificielle. Maintenant il partait au devant de la neige, il partait vers l'Europe en plein hiver. La meteo annonçait de la neige, plusieurs centimètres. Il n'en dormait plus la nuit. Il revêtirait son plus beau batik êt se prendrai en photo pour impressionner sa mère êt toute la famille. Il avait vu la neige, les flocons blancs par la fenêtre de sa petite chambre. Il n'était pas sorti, le froid avait paralysé sa soif de découverte.
RépondreSupprimerBlanc et glaciale. Comment peut on aimer la neige ? Comment peut il faire si froid ? Les indonésiens de Paris semblaient habitués .... Ce froid qui vous perce les os et la neige qui cumulait froid et humidité. Non non il ne espérait pas ici ... Son île de Java lui manquait.... Il raconterait la neige bien sur mais .... Il ne dirait jamais la douleur causée par le froid, la morsure du vent et celle plus vive encore des moqueries quand il était sorti si élégant vers la neige pour rentrer au plus vite, anesthésié par le gel êt malade déjà ...